J’ai téléphoné Mère la semaine dernière, quelques jours avant Noël. Tout allait bien dans notre conversation où je lui racontais comment se passait ma fin de semestre au travail avec les corrections, les réunions d’évaluation des notes finales des étudiants et la préparation pour le prochain semestre. Elle écoutait sagement mes lamentations de professeur, puis après quelques instants de silence de sa part et où je lui demande si elle est encore là, elle me demanda, « est-ce que tu enseignes encore? » Tristement, je lui réponds que bien sûr, j’enseignais encore et que tout allait bien de ce côté-là. Comme j’allais raccrocher et lui offrir mes salutations finales, elle me posa une drôle de question.
À ma grande surprise, elle me demanda comment allaient mes filles…
C’était la première fois qu’après 10 minutes de »ragotage » de ma part, qu’elle ne se rappelait pas avec laquelle de ses filles elle était en train de parler.
Un peu bêtement, mais aussi par curiosité, je lui demandai à qui elle croyait parler. Je doutais même qu’elle ait en tête l’un de ses filles. Elle m’a donné le prénom de Joe et mon frère ainé, qui était avec elle pour la semaine, lui glissa à l’oreille qu’il s’agissait plutôt de l’une de ses cadettes. Tout aussi incrédule, je lui répondis que je venais de lui raconter mes histoires d’enseignante et d’étudiants qui ne sont pas heureux de prendre des cours de français obligatoires inclus dans leur programme de formation post-secondaire et que Joe n’enseignait pas. Puis Mère me dit qu’elle trouvait que j’avais la même voix que ma sœur ainée.
Je me sentais plutôt mal de lui en faire le reproche et accusai plutôt le coup en lui disant qu’elle avait bien raison, ma voix ressemblait à celle de ma sœur Joe.
Cela m’attriste. À mon avis, Mère est passé à une autre étape de la maladie d’Alzheimer.
Aujourd’hui pourtant, lors d’un de mes appels hebdomadaires, elle m’écoutait encore sagement au téléphone parler de tempête de neige et des 30 cm à dégager devant ma porte, lorsque je lui demandai si elle savait avec qui elle parlait. Sans hésiter, elle prononça mon prénom sans problème. Ma sœur Joe était à ses côtés.